Jean-Louis Berner
« Optimiser le poste nettoyage est crucial »
Jean-Louis Berner, enseignant à l’Enil de Mamirolle, chargé de mission environnement en agro-alimentaire), interviendra sur l’optimisation de la consommation d’eau et la gestion des rejets.
➜ Que représente la problématique de l’eau dans la performance environnementale des fromageries ?
JLB : Il y a deux enjeux majeurs : l’utilisation de grands volumes d’une ressource qui se fait de moins en moins disponible, et la gestion des rejets, avec des contrôles de plus en plus stricts.
➜ Des repères pour mesurer le poids de ces consommations ?
JLB : Par essence, une fromagerie consomme beaucoup d’eau : 3 litres en moyenne par litre de lait. En Franche-Comté, les fruitières à comté sont en moyenne à 1,2 litre. Dans les ateliers pâtes molles, on se situe plutôt entre 2 et 3 litres. Et quand on travaille avec du lait cru, on peut monter à 4 ou 5 litres, car le produit est plus fragile, il faut nettoyer davantage : 80% de l’eau consommée dans une fromagerie est affectée au nettoyage. Ainsi, une toute petite fruitière qui transforme 5 millions de litre de lait par an va consommer environ 5 000 m³ d’eau par an.
➜ L’approvisionnement en eau devient parfois problématique…
JLB : Oui, avec les épisodes récurrents de sécheresse, on évoque de plus en plus des conflits d’usages entre opérateurs d’un territoire, surtout en milieu rural lorsque l’on dépend d’un forage ou d’une source, sans interconnexion avec d’autres ressources. Il y a parfois des difficultés d’alimentation en eau pour l’abreuvement des animaux.
➜ Quels sont les grands leviers pour optimiser sa consommation d’eau et la gestion de ses rejets ?
JLB : Optimiser le poste nettoyage est crucial, c’est là qu’il faut progresser en premier lieu. D’une part, en utilisant des outils adaptés, tels des pistolets, pour le lavage des sols, des murs, de l’extérieur de machines, et en améliorant les méthodes : il y a une logique rigoureuse à adopter, une façon d’organiser l’espace. D’autre part, en généralisant le contrôle des consommations pour évaluer la pertinence des actions. J’insisterai là-dessus lors de la conférence. Cela permet de surcroît de détecter des surconsommations, des fuites, des méthodes inadaptées …
Lorsque le nettoyage en place (NEP ou CIP) a été adopté, on essaie de réutiliser les dernières eaux de rinçage et de les stocker pour les réutiliser le lendemain. Optimiser le fonctionnement des NEP est fondamental, cela fait appel à beaucoup de technicité, avec des capteurs, des automatismes. Nous donnerons des éléments précis lors de la conférence sur ce sujet.
➜ Comment gérer les effluents ?
JLB : Pour épurer leurs eaux blanches, les petites structures ont deux options : soit se raccorder au réseau communal, mais il y a des contraintes fortes car le niveau des charges peut être très élevé, soit se doter de leur propre système d’épuration, le plus souvent basé sur une technologie analogue aux système à boues activées. Près d’une fruitière sur deux en Franche-Comté utilise un système SBR « Sequencing Batch Reactor », système compact qui ne demande pas trop de technicité, et assez simple à faire fonctionner. La méthanisation est plus exigeante, elle n’est pas forcément facile à gérer pour une structure fromagère. ◼