5e Journée TechniqueInnovation et évolutions des pratiques

Paris - 19 juin 2018

Sébastien Lagneaux

Les progrès de la climatisation dirigée

Sébastien Lagneaux (Clauger) procédera à une présentation des innovations en matière de gestion des ambiances de caves et d’atelier.

- Comment évoluent les demandes des fromagers concernant la gestion des ambiances de caves ?
SL : Ils me semblent plus sensibilisés qu’autrefois à cette problématique, quelle que soit la taille de leur entreprise. Ils ont conscience qu’une ambiance mal gérée, subie plus que contrôlée, peut impacter la qualité sanitaire des produits, les caractéristiques organoleptiques des fromages, le rendement matière ou les coûts d’exploitation. Par exemple, en Auvergne, un client nous a demandé d’améliorer sa cave qui enregistrait environ 6% de freinte anormale. Il avait besoin de 90-95% d’humidité relative mais n’atteignait, selon la saison, que 60 à 85%. Bilan : 75 K€ de manque à gagner !
 
- Quels sont les points qui vous semblent le moins bien maîtrisés ?
SL : La gestion des flux d’air avant tout. Les fromagers s’en aperçoivent lors d’audits obligatoires : ils ne sont pas toujours en mesure de prouver qu’à une date donnée, les flux étaient corrects dans leur fromagerie. Il existe depuis longtemps des systèmes capables de mesurer une différence de pression entre différentes salles. Cependant, ces capteurs, indépendamment de leur coût élevé, ne sont pas toujours fiables et précis pour de faibles niveaux de surpression comme c’est habituellement le cas en fromagerie.

Nous avons ainsi développé et breveté une solution intelligente permettant de visualiser en continu les flux d’air, d’identifier les risques en temps réel et les évaluer, de manager la cohérence des flux d’air en fonction des zonings de risques, sur des locaux sensibles ou à l’échelle d’un atelier. Ainsi, si une inversion de sens est détectée, le système alerte les opérateurs et peut mener des actions correctives pour rétablir la bonne circulation.

- A quel type d’acteurs s’adressent en priorité ce type de solutions ?
SL : A tout opérateur devant prouver à des organismes auditeurs la bonne marche en avant des flux d’air. Mais il est surtout recommandé et vendu aux fromageries spécialisées dans les pâtes molles ou aux ateliers multi-produits.

- On observe souvent sur le terrain des irrégularités de séchage…
- SL : Oui, ‘’sécher’’ entraîne de l’hétérogénéité. C’est une problématique aiguë pour les fromagers qui vendent à la pièce : ils doivent avoir les écart types de poids les plus faibles possibles pour éviter des déclassements.

- Quelles sont les innovations en la matière ?
SL : Elles portent sur les principes fondamentaux de diffusion d’air tels quel l’alternance des flux, la diffusion à basse vitesse sur des gaines verticales, voire même la mise en mouvement de produits autour d’un flux d’air dirigé.
 
- Autre problématique émergente, celle de la gestion des gaz.
SL : Cela concerne surtout le NH3 et le CO2 produits par le processus d’affinage. Ils ont des effets non seulement sur la santé et le bien-être des employés, mais aussi sur les qualités organoleptiques des fromages. Par exemple, en filière comté, un excès d’ammoniac par manque d’apport d’air neuf peut entrainer un phénomène de morgeage de la croûte avec des conséquences sur l’aspect et le goût final du fromage. A l’inverse, un manque de montée en humidité de la cave peut entrainer l’apparition de cirons sur des meules et une freinte anormalement élevée.
Des études sont en cours entre fromagers, affineurs et centres de recherche dans le but de déterminer la corrélation entre les concentrations en gaz et la qualité organoleptique des produits. On peut imaginer que les installations de demain seront capables de mesurer les concentrations en continu et de les réguler, soit en augmentant ou diminuant les concentrations. Il existe déjà des systèmes pour abattre la concentration en ammoniac.
 
- La gestion des ambiances est énergivore. Progresse-t-on sur ce point ?
SL : Oui, des techniques comme le free-cooling (« froid gratuit ») ou le refroidissement adiabatique commencent à être mises en place. Elles permettent d’utiliser les propriétés physiques de l’air afin de le rafraîchir à moindre coût, sans avoir recours à une production de froid classique. •